Aviation

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1) Balzac V et Mirage III V
Démonstrateur - Prototype VTOL - France - 1962

Au début des années 1960, les constructeurs aéronautiques Dassault Aviation et Sud-Aviation réalisèrent des expérimentations d'avions à décollage et atterrissage verticaux (ADAV ou VTOL) avec deux appareils: le Balzac V destiné à valider la formule retenue avec des moteurs existants et le Mirage III V aux performances supérieures grâce à de nouveaux réacteurs plus puissants. Le programme fut arrêté en 1966 et ne déboucher sur aucune construction en série... Tout avait commencé avec l'Atar volant, un prototype conçu pour valider le système de contrôle d'un avion en phase de sustentation par des jets d'air comprimé. Ce dispositif sera plus tard repris sur les Mirage III V et les Harrier (Grande-Bretagne). En août 1960, le gouvernement français lança un programme expérimental d'avion à décollage et atterrissage verticaux devant aboutir à un avion de combat. Dassault proposa un avion, le Mirage III V, équipé de 8 réacteurs de sustentation pour le décollage et l'atterrissage et d'un réacteur classique pour le vol normal. Le projet fut accepté, un contrat de développement fut accordé à Dassault et à Sud-Aviation. Pour valider la formule, un démonstrateur, la Balzac V, fut construit en utilisant des moteurs déjà existants: 8 réacteurs Rolls-Royce RB 108 placés verticalement dans le fuselage et un réacteur de propulsion Bristol Siddeley Orpheus 3. Plusieurs innovations sont faites: premières commandes de vol électriques et la télémétrie (pour communiquer les données du vol avec le sol en temps réel).

Le premier vol stationnaire est effectué le 12 octobre 1962 à Melun-Villaroche. La première transition vers le vol horizontal a lieu le 18 mars 1963 et un cycle complet de décollage vertical, vol en palier puis atterrissage vertical est réalisé le 29 mars. Hélas, le prototype s'écrase le 10 janvier 1964, le pilote Jacques Pinier est tué. L'avion a été été réparé et a repris ses essais, il est définitivement perdu le 8 septembre 1965, le pilote, Phillip E. Neale de l'USAF, est tué... Le Mirage III V a été commandé en août 1961 et devait atteindre Mach 2. Le Mirage III V est plus lourd que le Balzac V et équipé de moteurs plus puissants: 8 Rolls-Royce RB 162 pour la sustentation et un réacteur de propulsion Pratt et Whitney JTF10 construit sous licence par la SNECMA (sous la désignation TF106). Deux prototypes furent réalisés: le Mirage III V01 qui fit son premier vol stationnaire le 24 juillet 1965 et le Mirage III V02 dont le premier vol a été effectué le 22 juin 1966. La première transition du vol stationnaire au vol horizontal a lieu le 24 mars 1966. Le 12 septembre, le Mirage III V02 atteint la vitesse de Mach 2 en vol horizontal.

Là, quelque chose m'échappe. Malgré des deux accidents dramatiques ayant coûté la vie à deux pilotes, le Mirage III V avait fait ses preuves, c'était un véritable VTOL capable de décoller et d'atterrir à la verticale et ses performances en vol horizontal égalaient celle du célèbre Mirage III. Avec un tel appareil, on aurait économisé des milliards en se passant du Charles de Gaulle. Or, le ministère de la Défense a décidé d'abandonner le projet. La logique aurait voulu la poursuite du programme et de faire évoluer ces appareils, nous aurions aujourd'hui un VTOL plus performant que le Rafale et pouvant atterrir et se poser partout. Les porte-avions pourraient être réduits à les plateformes et se passer des lourds et complexes systèmes de pont oblique, de catapultage et de stabilisation du roulis et du tangage. Il y a toujours eu un fossé énorme entre les inventeurs, les constructeurs et les décideurs (le pouvoir). Le Mirage III V01 est désormais exposé au musée de l'air et de l'espace. Francis Bergèse, le dessinateur et scénariste actuel de Buck Danny, avait réalisé dans les années 1967/1968 une bande dessinée avec le Mirage III V: "Jacques Renne: Escadrille Spéciale".

Balzac V - Constructeur: Dassault Aviation - Démonstrateur de technologie - Équipage: 1 pilote
Motorisation: 8 Rolls-Royce RB108 de sustentation et 1 Bristol Orpheus 3 de propulsion
Envergure: 7,32 m - Longueur: 13,10 m - Vitesse maximale: 1 000 km/h (Mach 0.90)

Mirage III V - Constructeur: Dassault Aviation - Prototype - Équipage: 1 pilote
Motorisation: 8 Rolls-Royce RB162 de sustentation et 1 SNECMA TF106
Envergure: 8,80 m - Longueur: 16,30 m - Vitesse maximale: km/h (Mach 2)



2) Short SC-1
Prototype VTOL - Royaume-Uni - 1957

Au début des années 1950, la firme anglaise Rolls-Royce démontra la possibilité d’utiliser les turboréacteurs pour sustenter des avions à décollage vertical en faisant voler le «Flying Bedstead» (ou TMR), une sorte de structure tubulaire propulsée par deux réacteurs Nene dont le jet était dirigé vers le bas. Encouragé par les résultats recueillis, Rolls-Royce et son responsable de la recherche le Dr. Griffith commença à concevoir un réacteur léger qui servirait spécifiquement à la propulsion verticale. En utilisant des petits réacteurs pour le décollage et l'atterrissage, le réacteur principal pourrait être optimisé pour le vol normal et permettrait une plus grande efficacité en compensant le poids mort des réacteurs ascensionnels. Deux compagnies présentèrent des projets: Avro et Short. La proposition d'Avro était un Avro 707 avec six RB108 dans le fuselage, orientables, pour fournir la poussée vers l'avant à la place d'un moteur séparé de croisière. La proposition de Short, le SC-1, était un avion delta expérimental propulsé par quatre moteurs RB.108 montés verticalement sur des cardans dans le fuselage central pour les décollages et atterrissages verticaux et par un moteur de croisière RB.108 pour le vol horizontal. Le Ministère de l’air accepta et commanda deux prototypes en août 1954 sous l’appellation SC-1. La construction des deux prototypes débuta au début 1955.

Rolls-Royce construisit également un banc de test des réacteurs de sustentation. Le Short SC-1 était conçu pour étudier la transition et le vol à vitesse réduite. Il était équipé d'un train d'atterrissage fixe. La cellule était conventionnelle et fabriquée en alliage d’aluminium sauf la baie des réacteurs de sustentation en titane. Les réacteurs pouvaient être inclinés de 35° vers l’arrière ou vers l’avant. Inclinés vers l’avant, ils permettaient de décélérer rapidement pour se poser verticalement. Inclinés vers l’arrière, ils permettaient de réaliser rapidement la transition vers le vol horizontal. Des gaz prélevés sur les quatre moteurs ascensionnels étaient éjectés par des buses dans le nez, la queue et les saumons d’aile pour contrôler l’appareil à basse vitesse. Le premier prototype effectua ses essais au sol le 7 décembre 1956 avec seulement le réacteur de croisière. Après trois mois d’essais au sol, le prototype effectua son premier vol conventionnel le 2 avril 1957. Le premier vol vertical entravé sera réalisé par le second prototype le 26 mai 1958, le premier décollage vertical le 25 octobre 1958 et la première transition vol vertical / vol horizontal le 6 avril 1960 à Bedford. Au cours de l’été 1960, le premier prototype est équipé de ses réacteurs de sustentation.

En avril 1961, le premier prototype est retenu par le Royal Aircraft Establishment de Bedford, le second retourne chez Short pour y recevoir un nouveau système d’auto-stabilisation prenant en compte les perturbations atmosphériques. Le deuxième avion d'essai s'écrasa le 2 octobre 1963. Le pilote, J. R. Green, dirigeait l’appareil vers la zone d’atterrissage quand il constata une défaillance du gyroscope. Green passa aussitôt en mode manuel, mais tous les gyroscopes se déréglèrent et l’appareil heurta violemment le sol tuant son pilote. L’appareil a été reconstruit mais ne fut prêt qu’en mai 1966. Les vols sous élingues reprirent le 17 juin. Le programme d’essais fut achevé en 1971 bien après l’abandon de cette formule VTOL. Les réacteurs de sustentation n'équipèrent aucun autre appareil britannique en raison du succès du réacteur à tuyères orientables Pegasus utilisé sur le Hawker P.1127 puis sur le Harrier. Cette formule fut utilisée en France sur le Dassault Balzac puis le Mirage III V avant d’être abandonnés.

Envergure: 7.16 mètres - Longueur totale: 9,15 mètres - Vitesse maxi: 400 km/h
Motorisation: Quatre Rolls-Royce RB.108 montés verticalement et 1 pour la croisière - Armement: Aucun - Équipage: 1 pilote



3) Harrier
Chasseur VTOL - Royaume-Uni - 1960

ADAV ou VTOL (Vertical Take-off and Landing): avion conçu pour s'affranchir des pistes qui lui sont normalement nécessaires pour le décollage et l'atterrissage. Le Harrier est le premier appareil à décollage et atterrissage verticaux utilisé en service opérationnel. Le Harrier est propulsé par un réacteur à double flux à poussée vectorielle. Le prototype, le P.1127, effectua son premier vol en octobre 1960. En 1965, un second prototype, le P.1154 (ou Hawker Kestrel), capable de voler à Mach 2, fut réalisé mais le projet fut abandonné au profit du Harrier GR Mk 1 doté d'un réacteur à double flux Pegasus Mk 101. La version de série, le Harrier GR Mk 1 A, pourvue d'un Pegasus Mk 102 de 9 070 kgp, entra en service en 1969. L'avant du fuselage permettait d'y loger un télémètre à laser. Le réacteur à poussée vectorielle du Harrier lui permet des capacités uniques. Cet appareil est capable en effet d'opérer depuis des sites dispersés situés à proximité de la ligne de front. Après le Harrier GR Mk 3, doté d'une avionique sommaire et d'une faible capacité d'emport de charge, est apparu le Harrier GR Mk 5, beaucoup plus évolué. Il s'agit de la version britannique du AV-8B Harrier II assemblée en Grande-Bretagne. Elle est dotée d'un siège éjectable Martin-Baker, du système de contre-mesures électroniques Zeus et d'une centrale de navigation inertielle FIN.1075. Le Harrier GR Mk 7 dispose de la possibilité d'effectuer des vols de nuit et peut emporter une charge beaucoup plus élevée.

Le Harrier était trop lourd pour décoller verticalement avec son équipement de combat et cette manœuvre consommerait beaucoup de carburant. Il fut donc également utilisé comme STOVL (appareil à décollage court et atterrissage vertical) capable de se contenter de pistes de 180 mètres de long. Le Harrier est issu de travaux expérimentaux menés par Hawker dès les années 1950, un premier engin vola en 1954 suivi 3 ans plus tard par le SC-1 équipé d'une aile delta. Plutôt que d'avoir des réacteurs placés verticalement pour le décollage et l'atterrissage et un réacteur horizontal pour le vol normal, le même réacteur était utilisé pour toutes les phases de vol grâce à des tuyères orientables verticalement ou horizontalement.

Le AV-8B Harrier II (États-Unis) ou Harrier GR.5 (Grande-Bretagne) est la seconde génération du Hawker Siddeley Harrier. Son développement a débuté à la fin des années 1970 aux États-Unis puis au Royaume-Uni qui avait conçu la version initiale. En 1973, British Aerospace et McDonnell Douglas envisagent une version améliorée du Harrier capable d'emporter une charge deux fois plus importante sur une distance deux fois plus grande. Le projet est annulé par les Britanniques en 1975. Les Américains réalisent seuls une version moins ambitieuse ne nécessitant pas de développer un nouveau réacteur. Le 9 novembre 1978, un AV-8A doté d'une nouvelle aile en matériaux composites fait son premier vol. Des extensions de bord d'attaque sont ajoutées pour améliorer la manœuvrabilité. En 1980 les Britanniques, qui avaient également étudié une modification de l'aile du Harrier, décident de participer au projet américain. Le premier véritable AV-8B fait son vol inaugural le 5 novembre 1981. Il est capable d'emporter le double de charge d'un AV-8A avec 2 pylônes supplémentaires sous les ailes. Les 2 nacelles canons de 30 mm sont remplacés par un seul canon de 25 mm, l'autre pod contenant les munitions. Le poste de pilotage est entièrement revu, rehaussé sur le modèle du Sea Harrier et égalant celui du F/A-18 Hornet. De nouveaux systèmes électroniques sont installés.

La construction en série commença en 1983. Les États-Unis reçurent des AV-8B monoplaces et des TAV-8B biplaces d'entraînement. Le Royaume-Uni produisit des exemplaires de la version GR.5, basée sur le AV-8B avec des modifications importantes des systèmes électroniques. L'Espagne a également acheté des AV-8B. À la fin des années 1980, ces nouveaux avions avaient entièrement remplacé les Harrier de première génération. Le 24 novembre 2010, le gouvernement britannique a décidé la fin des opérations aéronavales du Harrier. Les derniers vols des Harrier de la RAF eurent lieu le 15 décembre 2010 au Royaume-Uni. Les Harrier des forces armées britanniques sont retirés du service.

AV-8B Harrier II / Harrier GR Mk 5
Constructeur: McDonnell Douglas, British Aerospace - Avion d'attaque au sol - Premier vol: 5 novembre 1978 - Mise en service: 1983
Équipage: 1 pilote - Motorisation: 1 Rolls-Royce Pegasus 105, turboréacteur à double flux, poussée unitaire de 98,1 kN
Envergure: 9,25 m - Longueur: 14,12 m - Hauteur: 3,55 m - Surface alaire: 22,61 m²
Vitesse maximale: 1 065 km/h - Plafond: 15 240 m - Rayon d’action: 1 000 km
Armement interne: 1 canon Gatling GAU-12 Equalizer de 25mm avec 300 obus - Externe: Jusqu'à 5 988 kg de charge sur 6 pylônes



4) Yakovlev Yak-38 et Yak-141
Chasseur VTOL - URSS - 1971, 1987

Dans les années 1950, les Américains expérimentèrent différents types d'avion à décollage vertical. Les Soviétiques commencèrent donc à développer un prototype VTOL: le Yakovlev Yak-36 «Freehand» qui servit de base au développement du Yak-38. Le premier vol eut lieu en janvier 1971, il entra en production de série en 1975 et fut mis en service en 1976 sur le porte-avions Kiev. Le Yak-38 était doté d'un réacteur à poussée vectorielle à l'arrière et de deux réacteurs verticaux à l'avant. Le contrôle à basse vitesse et en stationnaire, du mouvement de roulis était fait par des éjecteurs d'air comprimé en bouts d'aile. Les lacets étaient contrôlés par le même type d'éjecteur dans le cône de queue et le tangage par l'ajustement de la puissance des réacteurs verticaux. Le Yak-38 était doté d'ailes de petite dimension en flèche à 45 ° et pouvant se replier à mi-longueur afin de faciliter le rangement des aéronefs dans les hangars des porte-avions. Celles-ci possèdent quatre points d'ancrage pouvant recevoir entre 2 600 et 3 600 kg de charges. À pleine charge, les décollages prenaient la forme de STOVL (appareil à décollage court et atterrissage vertical).

Le Yak-38 fut surtout construit pour faire profiter la marine soviétique d'une expérience dans le domaine des avions à décollage vertical. En effet, ceux-ci étaient peu performants en termes de vitesse et d'emport d'armement et d'avionique. Ils procuraient à la flotte une capacité d'interception et d'attaque dans des régions trop éloignées des bases terrestres pour les avions basés au sol. Les bureaux d'études de Yakovlev développèrent un remplaçant au Yak-38, le Yak-141 Freestyle dont les prototypes volèrent pour la première fois en 1987. Mais le projet fut abandonné en 1990 (la chute de l'URSS). Le Yakovlev Yak-141 était le successeur du Yak-38. Il était capable d'effectuer des atterrissages et décollages verticaux et avait reçu le code OTAN Freestyle. Dès 1975, devant les déficiences du Yak-38 (Vitesse subsonique, avionique rudimentaire, faibles capacités d'emport et d'autonomie), les bureaux d'études de Yakovlev entamèrent l'étude d'un remplaçant. Le Yak-141 est conçu comme son prédécesseur avec un réacteur à poussée vectorielle pour la sustentation et la croisière plus deux réacteurs verticaux utilisés lors du décollage vertical, de l'atterrissage vertical et les phases de vol stationnaire. Deux prototypes furent construits ainsi que deux cellules pour les essais statiques. Le Yak-141 effectua son premier vol avec décollage classique le 9 mars 1987 puis son premier décollage vertical le 29 décembre 1989. Le second prototype sera gravement endommagé le 5 octobre 1991 lors d'un atterrissage sur le porte-avions Admiral Gorchkov. Le premier fut présenté lors du salon aéronautique de Farnborough en 1992. En fait, il n'était pas inconnu des Occidentaux car il fut repéré sur la base d'essai de Joukovsky par un satellite d'observation américain au milieu des années 1980. C'est là qu'il reçut le code OTAN Freestyle. Après la chute de l'URSS, la Fédération de Russie suspendit le programme. Le bureau d'études de Yakovlev a cependant continué le développement de versions améliorées.

Constructeur: Yakovlev - Chasseur embarqué VTOL - Premier vol: 9 mars 1987 - Équipage: 1 pilote
Motorisation: 1 turboréacteur Kobchenko/Soyouz RD-79V-300 avec post-combustion + 2 réacteurs RKBM/Rybinsk RD-41
Envergure: 10,10 m - Longueur; 18,30 m - Hauteur 5 m - Surface alaire 31,70 m²
Vitesse maximale: 1800 km/h (Mach 1,5) - Plafond: 15000 m - Rayon d’action en ADAC avec 1 t de charges: 1010 km
Armement interne: 1 canon de 30 mm - Externe: 2 600 kg en 4 points d'emport sous la voilure (missiles AA-10 Alamo ou AA-11 Archer ou bombes)


© Juin 2012 by Michel Mahler - Le Réveil des Marmottes

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