Un
détecteur de particules, installé sur la
station internationale ISS (International Space Station), a
décelé une importante source
d‘antiélectrons inattendue. C'est peut-être la
première trace de matière noire
décelée dans notre Univers ou si vous
préférez, d'antimatière. Selon Sylvie
Rosier-Lees, physicienne au Laboratoire de physique des
particules d'Annecy-le-Vieux et responsable d'AMS-France
(Alpha Magnetic Spectrometer), «Nos mesures avec le
détecteur AMS installé sur l'ISS (station
spatiale internationale) montrent sans l'ombre d'un doute
qu'il existe des sources inconnues d'antimatière dans
l'Univers...» Samuel Ting, prix Nobel américain
et porte-parole de l'expérience internationale AMS, a
publié un résultat spectaculaire
présenté au Cern à Genève et
publié dans la revue Physical Review Letters.
«Cette antimatière, des particules "miroir", a
des charges opposées aux particules composant la
matière classique. Elle ne peut avoir
été produite que par «une physique
exotique d'une nature nouvelle jamais observée sur
Terre...». C'est une révolution pour la physique
et pour la cosmologie: il pourrait s'agir des
premières traces de la matière noire
constituant plus de 25% de l'Univers, l'antimatière
recherchée en vain depuis des décennies. Mais
les scientifiques restent prudents et n'exclurent pas
l'autre source possible: des pulsars, des étoiles
à neutrons très compactes issues de
l'effondrement d'étoiles massives.
Ce détecteur a été installé sur
l'ISS en mai 2011, l'AMS a déjà
détecté plus de 30 milliards de particules de
rayons cosmiques dont 400 000 sont des positrons
(antiparticule de l'électron). Le positron a la
même masse que l'électron mais avec une charge
positive. Ces antiparticules sont extrêmement rares et
très difficiles à détecter, dès
qu'elles rencontrent une particule "classique", elles
s'annihilent mutuellement en transformant toute leur masse
en énergie. On savait déjà que les
collisions entre des rayons cosmiques très
énergétiques et des particules du milieu
interstellaire provoquent parfois des
désintégrations donnant naissance à des
positrons. Ce flux d'antimatière a été
détecté par l'AMS. En 2008, le
détecteur de rayons cosmiques italien Pamela
-installé à bord d'un satellite russe- l'avait
déjà l'avait décelée. Comme
Pamela, l'AMS a détecté bien plus de positrons
que ce qui était prévu. Le nombre de positrons
aurait dû décroître au fur et à
mesure que leur énergie augmente. L'AMS a
observé depuis dix-huit mois que la courbe
d'abondance des positrons augmente de façon
très surprenante au-delà de d'une certaine
énergie. D'après Sylvie Rosier-Lees,
«C'est cet excès très clair de positrons
qui nous indique qu'il existe d'autres sources
d'antimatière, dites primaires, car il ne peut s'agir
de la désintégration secondaire de rayons
cosmiques». Pour expliquer les observations faites sur
l'ISS, il n'y a que la théorie physique de la
supersymétrie faisant intervenir des collisions de
particules de matière noire qui produisent des
positrons de haute énergie. Ces particules inconnues,
recherchées sans succès par les physiciens
depuis des décennies, les wimps (weakly interacting
massive particles - particules massives interagissant
faiblement), interagissent peu avec la matière et
sont donc très difficiles à détecter
même si elles sont cinq fois plus abondantes dans
l'Univers que la matière classique. Le flux de
positrons enregistré par l'AMS ne varie pas dans le
temps, il est uniforme dans toutes les directions du cosmos.
On espère que dans quelques mois, l'AMS sera capable
de confirmer si ces positrons sont un signal de la
matière noire ou s'ils ont une autre
origine.
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